ภาพหน้าหนังสือ
PDF
ePub

Dès la fin des guerres puniques, la pierre noire qui symbolise la grande Mère de Pessimonte est établie sur le Palatin, mais ce n'est qu'à partir du règne de Claude que le culte phrygien se développe librement avec toutes ses splendeurs et ses excès. Il introduit dans la grave et terne religion des Romains une dévotion sensuelle, colorée et fanatique. Officiellement reconnu, il attire à lui et prend sous sa protection d'autres divinités étrangères venues d'Anatolie, et il les assimile à Cybèle et à Attis, métamorphosés en divinités panthées. Des influences cappadociennes, juives, persiques et même chrétiennes modifient les vieux rites de Pessinonte, et y font pénétrer avec le baptême sanglant du taurobole des idées de purification spirituelle et de rédemption éternelle. Mais les prêtres ne réussissent point à éliminer le fond de naturisme grossier que leur imposait une antique tradition barbare.

Depuis le n° siècle avant notre ère, les mystères d'Isis et de Sérapis se répandent en Italie avec la culture alexandrine, dont ils sont l'expression religieuse, et, en dépit des persécutions, ils s'établissent à Rome, où ils obtiennent de Caligula le droit de cité. Ils n'apportaient pas un système théologique très avancé, car l'Égypte ne produisit jamais qu'un. agrégat chaotique de doctrines disparates, ni une éthique très élevée, car le niveau de sa morale, celle des Grecs d'Alexandrie, -ne dépassa que tardivement un étiage médiocre. Mais ils firent connaî

[ocr errors]

tre d'abord à l'Italie puis aux autres provinces latines un antique rituel d'une incomparable séduction, qui savait surexciter les sentiments les plus opposés dans ses processions éclatantes et dans ses drames liturgiques. Ensuite ils donnaient à leurs fidèles l'assurance formelle qu'ils jouiraient après la mort d'une immortalité bienheureuse dans laquelle, unis à Sérapis, participant corps et âme à sa divinité, ils vivraient dans la contemplation éternelle des dicux.

A une époque un peu plus récente, arrivèrent les Baals de Syric, multiples et variés. Le grand mouvement économique qui, depuis le commencement de notre ère, amena la colonisation du monde latin par les esclaves et les marchands syriens, ne modifia pas seulement la civilisation matérielle de l'Europe mais aussi ses conceptions et ses croyances. Les cultes sémitiques firent une concurrence heureuse à ceux de l'Asie-Mineure et de l'Égypte. Peut-être n'avaient-ils pas une liturgie aussi émouvante, peut-être ne s'absorbaient-ils pas aussi complètement dans la préoccupation de la vie future, bien qu'ils enseignassent une eschatologie originale, mais ils avaient une idée infiniment plus haute de la divinité. L'astrologie chaldéenne, dont les prêtres syriens furent les disciples enthousiastes, leur avait fourni les éléments d'une théologie scientifique. Elle les avait conduits à la notion d'un dieu siégeant loin de la terre au-dessus de la zone des étoiles, tout

puissant, universel et éternel, tout ici-bas étant réglé par les révolutions des cieux durant des cycles infinis d'années, et elle leur avait enseigné en même temps l'adoration du Soleil, source radieuse de la vie terrestre.

Les doctrines érudites des Babyloniens s'étaient imposées aussi aux mystères persiques de Mithra, qui considéraient comme cause suprême le Temps identifié avec le Ciel et divinisaient les astres; mais elles s'y étaient superposées, sans la détruire, à l'ancienne foi mazdéenne. Les principes essentiels de la religion de l'Iran, rival séculaire et souvent heureux de la Grèce, pénétrèrent ainsi dans l'Occident latin sous le couvert de la sagesse chaldéenne. La religion mithriaque, la dernière et la plus haute manifestation du paganisme antique, eut pour dogme fondamental le dualisme perse. Le monde est le théâtre et l'enjeu d'une lutte entre le Bien et le Mal, Ormuzd et Ahriman, les dieux et les démons, et de cette conception originale de l'univers découle une morale forte et pure; la vie est un combat; soldat placé sous les ordres de Mithra, le héros invincible, le fidèle doit constamment s'opposer aux entreprises des puissances infernales, qui sèment partout la corruption. Cette éthique impérative, productrice d'énergie, est le caractère qui distingue le mithriacisme de tous les autres cultes orientaux.

[ocr errors]

Ainsi chacun des pays du Levant c'est ce que nous avons voulu montrer dans cette récapitulation

sommaire

avait enrichi le paganisme romain, de croyances nouvelles, destinées souvent à lui survivre. Quel fut le résultat de cette confusion de doctrines hétérogènes dont la multiplicité était extrême et la valeur très différente? Comment les idées barbares, jetées dans le creuset ardent du syncrétisme impérial, s'y sont-elles affinées et combinées? En d'autres termes quelle forme l'antique idolâtrie, tout imprégnée de théories exotiques, avait-elle prise au Ive siècle, au moment d'être définitivement détrônée. C'est ce que nous voudrions essayer d'indiquer sommairement ici, comme conclusion de ces études.

Toutefois peut-on parler d'une religion païenne? Le mélange des races n'avait-il pas eu pour résultat de multiplier la variété des dissidences? Le choc confus des croyances n'avait-il pas produit un fractionnement, une comminution des églises, et les complaisances du syncrétisme un pullulement des sectes? Les « Hellènes », disait Thémistius à l'empereur Valens, ont trois cents manières de concevoir et d'honorer la divinité, qui se réjouit de cette diversité d'hommages1. Dans le paganisme les cultes ne périssent pas de mort violente, ils s'éteignent après une longue décrépitude. Une doctrine nouvelle ne se substitue pas nécessairement à une plus ancienne. Elles peuvent coexister longtemps comme des possibilités contraires suggérées par l'intelligence pu la foi, et toutes les opinions, toutes les pratiques y

semblent respectables. Les transformations n'y sont jamais radicales ni révolutionnaires.

Sans doute, pas plus au Iv° siècle que précédemment, les croyances païennes n'eurent la cohésion d'un système métaphysique ou la rigueur de canons conciliaires. Il y a toujours une distance considérable entre la foi populaire et celle des esprits cultivés, et cet écart devait être grand surtout dans un empire aristocratique, dont les classes sociales étaient nettement séparées. La dévotion des foules est immuable comme les eaux profondes des mers, elle n'est ni entraînée, ni échauffée par les courants supérieurs. Les campagnards continuaient, comme par le passé, à pratiquer des rites pieux auprès des pierres ointes, des sources sacrées, des arbres couronnés de fleurs et à célébrer leurs fêtes rustiques aux semailles ou aux vendanges. Ils s'attachaient avec une ténacité invincible à leurs usages traditionnels. Dégradés, tombés au rang de superstitions, ceux-ci devaient persister durant des siècles sous l'orthodoxie chrétienne sans la mettre sérieusement en péril, et s'ils ne sont plus notés dans les calendriers liturgiques, ils le sont parfois encore dans les recueils de folk-lore.

A l'autre pôle de la société, les philosophes pouvaient se plaire à voiler la religion du tissu brillant et fragile de leurs spéculations. Ils pouvaient, comme l'empereur Julien, improviser au sujet du mythe de la Grande Mère des interprétations har

« ก่อนหน้าดำเนินการต่อ
 »