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rent quel trésor ils dédaignent : nous venons le leur rappeler ou le leur apprendre. Non pas que nous voulions transformer en polyglottes tous les Belges de la Flandre et du Brabant; cette qualité n'est désirable que pour les hommes de science et pour ceux à qui une grande fortune fait de grands loisirs, bien que l'acquisition de l'intelligence de toutes les langues d'origine teutonique soit à la portée des Flamands de tous les états: mais nous disons que le flamand devrait être tenu en haute estime et cultivé par la majorité de nos concitoyens, lors même qu'il ne servirait qu'à faciliter, à ceux qui le savent, l'étude de l'anglais et de l'allemand.

Or, nous démontrerons à l'évidence que cette étude, longue et pénible quand elle se fait par l'intermédiaire du français, devient extraordinairement facile à l'aide du flamand. Cette considération ne suffira pas peut-être pour désarmer toutes les hostilités, pour dissiper toutes les préventions; mais il est permis de penser qu'elle fera quelque impression sur l'esprit des hommes appelés à diriger la marche morale et intellectuelle de la Belgique. Depuis quelques années, dans notre pays comme dans le reste de l'Europe, on attache plus de prix à la culture des langues vivantes : aussi dans la Belgique flamande, presque point de colléges ou de pensionnats qui n'aient leurs cours d'allemand et d'anglais; mais partout, dans ces établissements, les deux langues s'enseignent en prenant le français pour point de départ et de comparaison. C'est un usage étrange, absurde; voici a peu près à quoi il équivaut : des habitants de Gand ou de Bruges ont à se rendre à Londres : ils pourraient avoir une traversée rapide en s'embarquant à Ostende, mais ils sont pressés d'arriver et, pour gagner plus promptetement leur destination, ils se mettent à traverser toute la France et vont s'embarquer à Marseille. Un des résultats de cet ingénieux détour c'est que plusieurs n'atteignent jamais le terme de leur voyage. Pour le voyage en Allemagne, détour plus long encore et résultats tout aussi satisfaisants.

C'est, comme nous l'avons dit, une absurde pratique. Pour peu qu'elle se prolonge encore dans nos provinces, il y a là de quoi nous livrer à la risée de l'Europe savante. Ne se rencontrera-t-il personne parmi nos hommes d'état pour nous sauver de ce ridicule, pour faire triompher les droits du bon sens, en introduisant aux écoles, qui, dans la Belgique flamande, relèvent de l'autorité supérieure, l'enseignement de l'allemand et de l'anglais d'après la comparaison avec la langue sœur, le flamand ? Une

pareille ination opérerait, sous le rapport de l'étude des langues vivans, une révolution générale: car le succès qu'on obtiendrait de cette réforme assurerait aux établissements de l'état une telle supériorité que toutes les institutions particulières se verraient forcées de suivre l'exemple donné par leurs rivaux.

Cette amélioration est le premier de nos vœux; c'est le désir d'en håter l'accomplissement qui a été le motif déterminant de notre travail. Ce désir sera-t-il exaucé ?Nous sommes porté à l'espérer en nous rappelant que depuis quelques années des mesures ont été prises qui indiquent que la langue flamande n'est plus systématiquement persécutée; mais nos doutes et nos craintes nous reprennent quand nous nous représentons qu'au-dessus de la puissance légale, même bien intentionnée, est placée la puissance entravante de la routine, la routine, cette reine des esprits vulgaires et dont les sujets, toujours nombreux, retrouvent tant d'énergie quand il y va de la défense d'une royauté fainéante !

Quoiqu'il en soit de l'application que recevra un jour la langue flamande, notre livre tend dès à présent à montrer de quelle vaste et salutaire extension cette application est susceptible. Ce livre, nous aurions pu l'intituler: A quoi le flamand est bon, et il est déplorable et étrange que nous ayons à l'écrire aujourd'hui: il devrait être fait depuis longtemps, ou plutôt depuis longtemps les simples et utiles vérités qu'il constate devraient être entrées dans le domaine des faits pratiques. Mais les tristes destinées qui pendant des siècles ont été le partage du pays sont à la fois l'explication et l'excuse de cette singularité.

Qu'on ne croie pas cependant que nous recommandions uniquement la culture du flamand comme moyen comparatif dans l'étude d'autres idiomes: non, nous soutenons aussi que, dans la Belgique flamande, le flamand doit universellement dominer comme langue maternelle, usuelle et même littéraire. Car nous sommes de ceux qui croient qu'aucune population ne peut impunément continuer à flotter entre deux langues, l'une parlée, l'autre écrite, l'une employée par le peuple, l'autre pratiquée par les classes supérieures ; nous sommes de ceux qui croient que là où s'enracine une aussi fatale habitude, les masses sont condamnées à rester éternellement stationnaires sur la route du progrès intellectuel et de la civilisation. Nous aurons l'occasion de revenir ailleurs sur cette idée. Mais le flamand est-il réellement propre à servir de clé dans l'étude d'une foule d'autres idiomes? est-il propre à devenir la

langue de la science et de l'imagination? Oui, répondent d'une voix unanime tous les juges compétents: les Flamands versés dans leur langue maternelle, les linguistes anglais, les érudits et les philosophes de l'Allemagne, les savants de tous les autres pays teutoniques; non, disent quelques civilisateurs qui nous sont venus de France et qui trouvent pour échos quelques Belges francisés. Chacun des chapitres que nous allons écrire dira à quoi ils convient d'ajouter foi, ou au témoignage raisonné d'une réunion d'hommes spéciaux qui ont étudié le flamand, ou à l'affirmation nue d'une poignée de critiques qui ne connaissent ni le flamand ni aucun autre idiome germanique.

Nous passons, sans autre préambule, à la division de la partie fondamentale de notre ouvrage.

Considérée comme un seul tout, la famille des idiomes dont nous allons entreprendre l'étude comparative, est appelée ordinairement la langue teutonique ou germanique. On lui donne aussi le nom de gothique, mais cette désignation est moins exacte, parce que le gothique forme l'une des branches de la souche commune. D'autres se servent de la dénomination de teuto-gothique, ce qui serait plus admissible. Pour nous, nous avons préféré dans ce livre l'expression de langue teutonique ou germanique, comme la plus simple et la plus universellement reçue.

Il est certain que les langues teutoniques sont toutes congénères; telles elles apparaissent encore, quand on les examine dans leur état actuel; telles elles apparaissent surtout dans leur état ancien. Toutes découlent donc d'une source commune, et elles ne procèdent point l'une de l'autre. Seulement ces langues sœurs, tout en conservant, chacune, les traits distinctifs de la famille primitive, ont pris, dans la succession des temps, des allures et des couleurs plus ou moins différentes.

C'est d'après ces différences que l'on établit la classification du groupe.

La classification la plus générale qui se présente d'abord est celle qui divise la famille en deux branches : le haut-allemand (hochdeutsch) et le le bas-allemand (niederdeutsch), cette dernière expression employée dans une acception très large et comprenant les idiomes des Pays-Bas, de l'Angleterre et de l'Ecosse, de presque toute l'Allemagne septentrionale, de la Scandinavie et de l'Islande.

Certains caractères communs à tous ces idiomes autorisent cette

division. Cependant, comme, au milieu des nombreux points de contact qu'ils conservent, ils offrent aussi des caractères particuliers constituant des différences assez marquées pour les partager en classes distinctes, il vaut mieux admettre une division moins générale et dédoubler la seconde branche. On range ainsi toute la famille en trois grandes classes : le haut-allemand, le bas-allemand (niederdeutsch) et le scandinave.

Le haut-allemand ou allemand littéraire est seul dans sa branche, eu égard aux temps modernes. On le divise, par rapport à son état ancien, en vieux haut-allemand (alt hochdeutsch) et en haut-allemand moyen (mittel hochdeutsch).

Le niederdeutsch (Fl. nederduitsch) se subdivise en hollandais, flamand et plattdeutsch, trois dialectes très rapprochés d'un seul idiome. Au fond, et dans leurs formes écrites, le hollandais et le flamand ne forment qu'une seule langue, que l'on peut désigner par le mot nederlandsch, qui ne peut se traduire que par néerlandais, terme auquel la passion politique est parvenue à attacher une idée de mépris. Au nederduitsch se rallient aussi, mais moins intimement, l'anglais et l'écossais (lowland schotch). Les rameaux anciens de cette branche sont le frison, le vieux saxon et l'anglo

saxon.

Le francisque ou idiome des Francs est trop peu connu pour le classer avec certitude. C'était un amalgame de dialectes mêlés comme les peuples qui formaient la redoutable confédération de la Germanie. Le caractère haut-allemand parait cependant avoir fini par y dominer.

Le gothique, du moins le méso-gothique, est mieux connu, mais on n'est pas plus d'accord sur la classification qu'il convient de lui donner. Nous voyons les savants le relier tour à tour à chacune des trois grandes branches du teuton: cela provient de ce que par certains points il touche à toutes les trois. Nous sommes de l'avis de ceux qui le rangent de préférence dans la classe du nederduitsch.

La troisième branche, ou le scandinave, comprend le danois, le suédois, le norvégien et l'islandais.

Les trois premiers dialectes s'éloignent plus ou moins de l'ancien scandinave (danska tunga), qui se parlait aussi dans le Groenland, dans les îles Ferröe, Shetland, Orcades, etc., et qui s'est conservé, à de légères modifications près, dans l'islandais de nos jours.

Des trois branches qui forment la famille des langues teutoniques, laquelle est la plus ancienne, ou, pour poser la question en termes plus précis, laquelle a conservé le plus fidèlement les formes antiques, a retenu le mieux l'empreinte du type primitif? A cette question la réponse des linguistes les plus estimés est unanime : tous se prononcent en faveur du nederduitsch.

En l'absence de documents littéraires antérieurs à l'époque reculée où commença la divergence des idiomes septentrionaux, la linguistique, pour résoudre le problême a recours à la comparaison des mots teutons qui se répètent dans les langues similaires anciennes et les montre offrant presque toujours une forme beaucoup plus rapprochée du nederduitsch que du haut-allemand (1). On en est encore aux conjectures pour expliquer les déviations particulières qu'on remarque dans ce dernier idiome la plus vraisemblable, c'est qu'elles sont dues au contact des populations slaves, qui, pendant plusieurs siècles ont pesé sur une partie de l'Allemagne, et dont la langue possède en effet les sons qui constituent la différence entre le système phonique du haut-allemand et celui des autres idiomes teutoniques.

:

«Le niederdeutsch n'est pas une langue distincte du teutonique; il est au contraire essentiellement teutonique. Les vocables du niederduitsch ont plus reçu de l'ancien teuton qu'aucune autre langue. A comparer à l'autre dialecte, le haut-allemand est une langue toute nouvelle, surtout en ce qui concerne la prononciation. Le teuton primitif a, sous beaucoup de rapports, une très grande analogie avec le niederdeutsch » (1).

Bien d'autres écrivains du midi de l'Allemagne font le même (1) Le lecteur pourra vérifier par lui-même cette observation dans les listes de mots similaires que nous donnons au chap. II, en parlant du sanskrit, du grec et du latin. Dans cette comparaison on doit surtout avoir égard au changement des consonnes, que les linguistes appellent avec raison les articulations des mots. Ainsi le Fl. wet-en et l'Angl. wit, savoir, reproduisent mieux la racine sanskrite vid,que ne le fait l'allemand wiss-en. Le Fl. loop-en, courir, est plus près du sanskrit laip que l'All. lauf-en, -Les historiens romains mentionnent les Catti et les Suevi, la forme correspondante à ces noms de peuples est en nederduitsch Katten et Sweven ou Zweven, tandis qu'en haut-all. elle est Hessen et Schwaben. - Dans les vieilles lois de la Bavière écrites en latin (7me siécle), on trouve les mots tunin et lid (Fl. tuin et lid); aujourd'hui en Bavière les mots analogues sont devenus Zaun et glied.

(1) Morhoff, Unterricht von der deutsche Sprache, p. 255.

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