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CHAPITRE III.

DES RAPPORTS DU FLAMAND ET DU HOLLANDAIS.

DE L'ORTHOGRAPHE FLAMANDE.

Taelschryvers hebben altyd getwist en zullen altyd twisten. Geen tael is ooyt door lettersplitters en woordensaegers weezentlyk beleedigd geworden.

M. l'abbé DE FOEKE.

(Discours prononcé le 24 septembre 1839, dans une séance publique de la Société de la Flandre Occidentale pour la propagation de la langue et de la littéra ture nationales.)

Les docteurs en linguistique ont toujours disputé et dis puteront toujours. Mais jamais des fendeurs de lettres et des acieurs de mots ne peuvent faire un tort réel a quelque langue que ce soit,

Schooldroomen!

M. le professeur BORMANS.

(Rapport a la Commission Royale.) Rêveries d'école !

Much ado about nothing.

SHAKSPEARE.

Beaucoup de bruit pour rien.

Dum vitant stulti vitia, in contraria currunt,

HORACE.

Qu'un sot fuie un travers, il tombe dans un pire.

Le flamand, le hollandais et le plattdeutsch sont, comme nous l'avons dit, trois dialectes très rapprochés d'un même idiome, qui en français moderne n'a pas de dénomination propre, mais qui se désignait exactement autrefois par le nom de thiois (dietsch, comme

on dit encore dans quelques-unes de nos provinces). Ce terme a vieilli, mais on peut le remplacer par celui de nederduitsch, mot qui n'a pas d'équivalent dans la langue française, et que, de peur de mauvaise interprétation, on doit se garder de traduire par néerlandais ou bas-allemand.

Dans l'ordre que nous avons adopté pour ce livre, nous avons d'abord à examiner les rapports du flamand et du hollandais, dialectes qui ont entre eux plus d'affinité encore que n'en offre l'un ou l'autre avec le plattdeutsch.

Le flamand et le hollandais ne forment donc pas deux langues distinctes, mais deux dialectes fort ressemblants d'une même langue.

Si cette proposition se présentait dégagée de sophismes et de chicanes, le présent chapitre serait fort succinct.

La thèse que nous avons à défendre est des moins compliquées. Un philosophe, pour prouver le mouvement que l'on niait devant lui, se mit à marcher; nous pourrions nous servir de quelque démonstration semblable. Nous pourrions mettre en regard une page d'un auteur hollandais estimé et la traduction flamande, puis, une page d'un bon écrivain flamand et la version hollandaise, et tout serait prouvé : de ce rapprochement ressortirait à l'évidence cette vérité incontestable qu'il ne s'agit que de deux dialectes n'offrant entre eux que des différences d'orthographe peu nombreuses et peu importantes. Mais tant de concision ne nous est pas permise : la question, toute simple et toute claire qu'elle est, a été déplorablement embrouillée et obscurcie. Nous avions à parcourir une route unie et fort courte, et voilà que nous allons essuyer un long retard, parce que la voie a été encombrée par des sottises déjà anciennes que sont venues exhausser des sottises nouvelles.

C'est de ces extravagances accumulées que nous devons préalablement déblayer le terrain.

Il nous importe d'autant plus de le faire, que cette tâche rentre directement dans le cadre que nous nous sommes tracé. Nous avons à cœur de prouver que le flamand est une des plus belles langues connues, et qu'à l'aide de cette langue, bien sue, on en comprend une dixaine d'autres, celles-ci d'emblée, celles-là au bout de peu de temps et de peu d'efforts; nous écrivons spécialement pour détromper les Flamands gallomanes, nos compatriotes wallons, les étrangers en général, gens qui tous ont sur l'admirable idiome

des notions si ridiculement erronées et l'on vient épaissir les ténèbres sur leurs yeux, on leur apprend que les deux dialectes même les plus ressemblants n'ont entre eux aucune affinité, et on leur fait penser et dire que les Flamands en sont encore à jeter les premiers fondements d'une langue informe, pauvre et sans règles certaines (4)!

Faisons bien vite tomber cette poussière si mal à propos soulevée; mettons à nu les proportions lilliputiennes d'un nain habillé en géant; simplifions les faits; désenflons les exagérations.

Mais d'abord rappelons bien que nous n'avons pas mis de cocarde à notre plume; répétons que nous faisons de la philologie et non pas de la politique, et que dans ce chapitre, pas plus que dans le reste de notre livre, nous ne voulons mêler à une question de linguistique des querelles de parti.

Cependant, forcé d'aller chercher nos adversaires sur la route où ils s'égarent, nous ne pouvons nous dispenser de toucher à quelques incidents qui se rattachent à la politique. Nous ne le ferons que dans la juste mesure des besoins de notre sujet, et avec l'entière impartialité d'un homme de lettres qui a dit adieu aux luttes des factions.

Commençons par admettre un fait incontestable, quelque bizarre qu'il puisse paraître aujourd'hui : oui, il est certain que sous Guillaume 1er, la Belgique flamande ne se soumit qu'avec une extrême répugnance à se servir de sa langue nationale comme langue officielle. Mais cette répugnance prenait-elle sa source dans la substitution violente d'un dialecte à un autre dialecte, ou, comme le

(4) Ceci non-seulement se dit, mais s'imprime. Au bruit de risibles disputes, un des rédacteurs français de l'Indépendant, sans posséder les plus simples notions de la question, et croyant, comme presque tous les Français, que l'esprit et le beau langage autorisent à trancher n'importe quelle discussion, accourut se mêler à la polémique sur l'orthographe flamande, Il avait découvert, lui, que la langue la plus ancienne peut-être de l'Europe, et à coup sûr la plus riche, était encore dans la première enfance, qu'elle n'avait pas même un commencement de système orthographique et ne possédait qu'un vocabulaire fort incomplet. D'où il tirait cette conclusion aussi charitable que judicieuse : Le flamand doit mourir. Cet arrêt de proscription lancé dans un feuilleton signé E. R., ne fut pas médiocrement sifllé dans la Belgique flamingante. Quatre ans se sont écoulés depuis, et le flamand n'est pas mort. Nous verrons dans un autre chapitre jusqu'à quel point sont solides les considérants dont s'étayait la sentence fulminée par le Sylla parisien.

disent M. de Foere et les siens, de la langue hollandaise à la langue flamande ? Non, et la preuve c'est que jamais il ne fut enjoint aux habitants des provinces flamandes de parler ou d'écrire le hollandais, mais bien le flamand; et la preuve de cette preuve, c'est que partout nos notaires et nos praticiens continuèrent, s'ils le préféraient, à se servir de la vieille orthographe flamande; c'est qu'il était permis à nos avocats de jargonner même, s'ils le jugeaient à propos, dans leur idiome natal, et Dieu et nos oreilles savent si, pendant les sept ou huit ans qu'a duré ce régime, les membres des barreaux flamands ont usé de la permission (1)!

L'aversion pour l'usage officiel du nederduitsch avait donc nécessairement une autre cause, et cette cause, la voici : c'est qu'une grande partie de la génération d'alors avait contracté l'habitude de traiter les affaires politiques en français; c'est qu'une autre partie de cette même génération cédait au charme secret du nitimur in vetitum, et s'y laissait entraîner avec d'autant plus d'abandon qu'elle y trouvait le moyen de contrarier un gouvernement qui avait le malheur de ne pas être populaire.

Voilà l'explication véritable de la défaveur presque générale qui accuillit, même dans les provinces essentiellement flamandes, les arrêtés du 15 septembre 1819 et du 26 octobre 1822.

Maintenant, dira-t-on que le roi Guillaume a agi avec trop de brusquerie; qu'il a eu tort de heurter ainsi de front les habitudes et les sympathies de l'époque ? Nous, pour notre part, nous ne ferons pas difficulté de souscrire à ce jugement; car nous tenons pour axiome politique que les gouvernements doivent agir avec ménagement à l'égard des opinions généralement répandues parmi les gouvernés, même alors que ces opinions seraient des préjugés. Le roi des Pays-Bas, au lieu de fixer l'introduction officielle du nederduitsch dans les provinces méridionales à l'année 1823, aurait dû la renvoyer à 1835 ou 1840 ; il aurait dû laisser à une génération nouvelle le temps d'arriver sur la scène de la vie active.

Au surplus, l'apologiste en titre des actes du roi Guillaume,

(4) L'arrêté du 1er octobre 1844 portait que les actes rédigés EN FLAMAND seraient enregistrés sans qu'il fût nécessaire d'y joindre une traduction française, et que les actes de l'état civil seraient tenus dans la langue usitée dans chaque commune. Dans cet arrêté, le roi se réservait de prendre des dispositions ultérieures sur l'usage de la langue flamande dans les autres actes publics. L'arrêté du 15 septembre 1819 contenait ces dispositions ultérieures, tout

M. le baron de Keverberg, est forcé, lui aussi, de reconnaître que le grief des langues, même réduit à sa véritable dimension, fut une faute politique (1).

Quoi qu'il en soit, on comprend que pendant une lutte politique à mort, au flagrant de la guerre civile, la passion torture et falsifie même un peu les faits; on conçoit les hyperboles du patriotisme effervescent, les déclamations de l'esprit national surexcité : mais ces ébullitions révolutionnaires ne doivent pas déborder jusque dans une époque d'ordre et de calme; et qu'il s'agisse de langue ou de tout autre chef de l'ancien acte d'accusation dressé contre le gouvernement des Pays-Bas; que le sujet soit traité par un simple citoyen ou par des représentants de la nation, pour tous, au bout de quatorze ans, il est temps de rentrer dans l'histoire.

La prédilection pour le français, née de l'habitude, et les préventions populaires, conçues à tort ou à raison, contre le gouvernement hollandais, rendent donc exclusivement compte de la

en maintenant les premières; mais nulle part cet arrêté ne fait mention de la substitution du hollandais au flamand ou de l'emploi obligatoire d'une orthographe exclusive. Ce qui pourtant a autorisé et accrédité les déclama-tions à ce sujet, c'est le mot landtael qui, dans la traduction française a été rendue fautivement par langue nationale. Or, le mot landtael signifie langue propre à une contrée, dialecte, et l'usage et tous les dictionnaires lui assignent cette signification. Le gouvernement des Pays-Bas n'y attachait pas d'autre sens, témoin ce passage de l'arrêté du 26 octobre 1822, qui complétait les dispositions de celui du 15 septembre 1849 : « A partir du 1er janvier 4823, les dispositions de notre arrêté du 15 septembre 4819, seront rendues applicables à toutes les villes et communes, dans les arrondissements de Bruxelles et Louvain, province du Brabant méridional, lesquels. . . . . . ne se composeront désormais que de communes où la langue FLAMANDE est la langue NATIONALE. »

Ceci est décisif. Du reste, ici surtout cette traduction est vicieuse, et lanque nationale d'une ou de plusieurs communes est parfaitement ridicule. Il fallait dire tout uniment: où la langue flamande est le dialecte dominant; ou mieux et plus simplement encore dont le dialecte est le flamand.

Au surplus, quand même, ce qui n'est pas, il y aurait doute sur le texte, l'exécution et l'application pratique sont là pour prouver que les arrêtés dont il s'agit ne recevaient point d'autre interprétation de la part du gouvernement. Le tout revient à ceci : le dialecte flamand fut déclaré obligatoire dans les provinces flamandes. Après cela, se servait de l'orthographe hollandaise qui voulait; mais personne ne subissait de contrainte.

(1) Du royaume des Pays-Bas, par le baron de Keverberg. Tome 1es, 2༠ livraison, page 307.

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