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vrai Dieu; et ils le pourraient, parce qu'il n'y a que le désir d'être heureux ou de n'ètre pas malheureux qui soit invincible. L'ètre précisément comme tel, sans le bien et le mal-être actuel ou futur, paraît fort indifférent à la volonté, car sans quelque espérance ou quelque crainte d'une autre vie, et sans la douleur actuelle qu'on souffre à se donner la mort, il y a bien de l'apparence que tous ceuxlà se la procureraient qui sont actuellement misérables et pleinement convaincus qu'ils ne seront jamais délivrés de leurs misères.

7° Qu'Adam après son péché, sachant qu'il méritait une éternité malheureuse, devait mais ne pouvait plus aimer Dieu tel qu'il est; puisque Dieu qui était son bien et sa fin ne pouvait plus l'être, mais uniquement son mal ou la cause véritable de ses éternelles douleurs. Il ne devait plus être capable que de désespoir, qui produit nécessairement le désir de n'être plus. Mais la connaissance du médiateur ayant produit en Adam l'espérance que Dieu deviendrait son bien, alors il a pu l'aimer tel qu'il est.

8° Qu'en supposant néanmoins que Dieu lui eût rendu l'amour dominant de l'ordre, il aurait pu aimer Dieu vengeur et déterminé à le punir, pourvu néanmoins que la beauté de la justice ou l'horreur de l'injustice fùt un motif plus fort et plus vif que la douleur; c'est-à-dire que l'ordre immuable de la justice lui plût davantage, ou que l'injustice lui fit plus d'horreur que la douleur actuelle. C'est en ce sens que j'ai dit ailleurs que ceux qui voient Dieu tel qu'il est l'aimeraient au milieu des plus grandes douleurs; et que ce n'est pas l'aimer comme il mérite de l'être, que de l'aimer seulement à cause qu'il est le seul qui puisse causer en nous des sentiments agréables. L'objection à laquelle je répondais déterminait le mot de plaisir aux plaisirs confus et sensibles. Et quand je dis ici qu'on ne peut rien aimer que ce qui plaît, je prends le mot de plaisir dans toute son étendue. Au reste, je n'examinais 'pas dans les Conversations chrétiennes la question dont il s'agit. Pour s'instruire de mon sentiment ladessus, il fallait plutôt lire le Traité de morale que j'ai fait, ou du moins le chapitre VIII. Ce traité regarde bien plus la question dont on dispute, et il est plus nouveau que les Conversations que j'ai composées il y a plus de vingt ans. On doit croire que les auteurs sont moins ignorants à cinquante ans qu'à trente ou quarante, et que les efforts qu'ils doivent faire pour avancer dans la connaissance de la vérité ne sont pas entièrement inutiles. Mais de plus il ne faut pas s'imaginer que tout ce que dit un auteur ce soit véritablement son sentiment. Car on dit bien des choses par préjugé ou sur la foi des autres, et parce qu'elles paraissent d'abord vraisemblables, surtout quand ce qu'on dit ne regarde qu'indirectement le sujet qu'on traite. Il y a

dans mes livres cent endroits contraires au sentiment qu'on a voulu m'attribuer. On peut dire avec vérité qu'on n'a de sentiment déterminé qu'à l'égard des questions que l'on a sérieusement examinées. Et tous ces passages qu'on entasse pour se prévaloir de l'autorité des autres ne prouvent pas même que ceux que l'on cite aient eu véritablement l'opinion qu'on leur attribue. On pourrait souvent prouver le contraire par d'autres passages des mêmes auteurs; et peut-être que s'ils revenaient au monde, ils nous diraient de bonne foi qu'ils n'ont jamais examiné la matière sur laquelle on prétend décider par leur autorité.

9o Il suit encore des principes que j'ai tâché d'établir que l'indifférence pour sa béatitude, pour sa perfection et pour son bonheur est non-seulement impossible, mais qu'il est très-dangereux d'y prétendre, parce que cela ne peut qu'inspirer une nonchalance infinie pour son salut, qu'il faut opérer, comme dit l'apôtre, avec crainte et tremblement. Cette indifférence par laquelle on prétend détruire entièrement l'amour-propre ne le combat qu'en apparence. C'est une victoire imaginaire qui nous flatte d'autant plus qu'elle nous coûte moins. Il est vrai que pour en venir là il a fallu bien combattre contre la raison et contre l'impression naturelle que Dieu met en nous pour la béatitude. Elle coûte beaucoup cette victoire prétendue par cet endroit-là; mais il n'en coûte peut-être à l'amourpropre corrompu rien de ce qui le flatte le plus.

40° Que ces états de sécheresse dans lesquels on n'a point de goût pour la vertu sont fort dangereux; il serait impossible alors de résister aux tentations si l'on n'était soutenu du moins par une secrète horreur du péché; car le dégoût du vice nous touche quelquefois aussi vivement et plus vivement que le goût de la vertu; cela, dis-je, serait impossible, puisqu'il n'est pas possible de persévérer dans le bien sans la grâce de Jésus-Christ; car, selon saint Augustin, les secours de la grâce de Jésus-Christ ne consistent que dans de semblables sentiments. Il n'y a que la lumière et le sentiment qui déterminent nos diverses volontés : la lumière est la grâce du Créateur, et le sentiment est celle du Réparateur. L'état des sécheresses est le plus méritoire, mais il n'est pas le plus sûr.

44° Qu'il faut travailler de toutes ses forces à l'acquisition des vertus, à sa propre perfection, par le désir même qu'on a pour son bonheur futur; sachant bien que, Dieu étant juste, c'est une nécessité que l'un soit réglé sur l'autre. Il faut que ce désir d'être heureux, dont l'abus fait les voleurs et les avares, nous rende avares de cette avarice spirituelle que quelques gens condamnent comme contraire à la volonté de Dieu. Hæc est voluntas Dei sanctificatio

vestra, dit saint Paul. Estote perfecti sicut Pater vester cœlestis perfectus est, dit Jésus-Christ même. On ne peut trop désirer sa perfection. Mais il ne faut pas s'imaginer qu'on la puisse acquérir sans le secours de Jésus-Christ, sans ces grâces de lumière vive et de sentiment par lesquelles la beauté de l'ordre nous touche et le désordre nous fait horreur; car il faut que l'amour-propre soit éclairé, et en même temps vivement touché par les vrais biens, afin de pouvoir les aimer.

12o Enfin il s'ensuit que cette proposition, « Il ne faut souhaiter sa béatitude que parce que Dieu le veut », est du moins équivoque ; car elle est fausse en ce sens qu'elle suppose qu'il dépende de nous de vouloir être heureux, ou que nous puissions avoir des motifs préalables au désir de la béatitude, par lesquels nous puissions la vouloir ou ne la vouloir pas, elle qui est le principe de tous nos désirs. C'est à peu près comme si l'on disait qu'il ne faut être que parce que Dieu le veut. Le motif du désir naturel que nous avons pour la béatitude est en Dieu, qui en est l'auteur, et nullement en nous. Mais cette proposition est vraie en ce sens que, voulant être solidement heureux dans la jouissance du souverain bien, nous devons nous contenter du degré de jouissance qui nous sera prescrit dans la loi éternelle, parce que ce plus petit degré remplit suffisamment le désir naturel que nous avons pour la béatitude; qu'aimant l'ordre, nous avons un motif de nous y conformer, et que, lorsqu'on a sujet d'être content, et qu'on est sage et éclairé, on ne désire point ce qui est non-seulement injuste, mais absolument impossible. Mais présentement que nous sommes en état de mériter par notre coopération à la grâce, plus nous aimons Dieu, plus nous devons aspirer à la plus haute perfection, parce qu'en effet plus le bonheur des saints est grand, plus ils jouissent parfaitement de Dieu, plus aussi leur amour est ardent et leur transformation parfaite.

N'en voilà que trop, ce me semble, pour prouver que je ne suis pas dans le sentiment qu'on a voulu m'attribuer, et que ce n'est pas sans raison que je ne veux pas m'y rendre. En effet, prévenu comme je le suis d'estime et d'amitié pour l'auteur de la Connaissance de soi-même, il me fallait de bonnes raisons, ou du moins que je crusse telles, pour m'éloigner de ce qu'il pense sur l'amour désintéressé. Mais si cet écrit suffit pour faire connaître mes sentiments sur cela et sur quelques autres questions qui y ont rapport, je doute fort qu'il soit suffisant pour en convaincre les autres; car, outre qu'il est trop court et qu'il suppose bien des choses prouvées ailleurs, la matière est plus obscure et plus difficile qu'on ne croit.

Comme nous ne connaissons notre âme et ses facultés que par le sentiment intérieur que nous avons de nous-mêmes, il est impossible de les définir clairement, ni par conséquent de conserver l'évidence dans ses raisonnements. Je prie ceux qui ne sont pas de mon sentiment de prendre garde surtout à ne pas juger de Dieu par eux-mêmes, et à ne le pas croire capable de vouloir rien contre l'ordre immuable de la justice. Nous humanisons souvent la divinité, et nous lui attribuons souvent des desseins et une conduite semblable à la nôtre; c'est là une source féconde d'erreurs. La volonté de Dieu est toujours conforme à l'ordre, parce qu'il ne peut démentir ses attributs et qu'il se glorifie de les posséder; il veut invinciblement être tel qu'il est; il veut aussi que nous le voulions nous-mêmes et que nous l'aimions tel qu'il est, et non tel qu'il nous plaît de supposer qu'il soit,

D'UN PHILOSOPHE CHRÉTIEN

AVEC

UN PHILOSOPHE CHINOIS

SUR

L'EXISTENCE ET LA NATURE DE DIEU.

LE CHINOIS.

- Quel est ce Seigneur du ciel que vous venez de si loin nous annoncer? Nous ne le connaissons point, et nous ne voulons croire que ce que l'évidence nous oblige à croire. Voilà pourquoi nous ne recevons que la matière et le Ly, cette souveraine vérité, sagesse, justice, qui subsiste éternellement dans la matière, qui la forme et la range dans ce bel ordre que nous voyons, et qui éclaire aussi cette portion de matière épurée et organisée dont nous sommes composés. Car c'est nécessairement dans cette souveraine vérité, à laquelle tous les hommes sont soumis, les uns plus, les autres moins, qu'ils voient les vérités et les lois éternelles, qui sont le lien de toutes les sociétés.

LE CHRÉTIEN. Le Dieu que nous vous annonçons est celui-là même dont l'idée est gravée en vous et dans tous les hommes. Mais faute d'y faire assez d'attention, ils ne la reconnaissent point telle qu'elle est, et ils la défigurent étrangement. Voilà pourquoi Dieu, pour nous renouveler son idée, nous a déclaré par son prophète qu'il est celui qui est, c'est-à-dire l'être qui renferme dans son essence tout ce qu'il y a de réalité ou de perfection dans tous les êtres, l'être infini en tout sens, en un mot l'être.

Lorsque nous nommons Seigneur du ciel le Dieu que nous adorons, vous vous imaginez que nous le concevons seulement comme un grand et puissant empereur. Votre Ly, votre souveraine justice, approche infiniment plus de l'idée de notre Dieu que celle de ce puissant empereur. Détrompez-vous sur notre doctrine. Je vous le répète, notre Dieu c'est celui qui est, c'est l'ètre infiniment parfait, c'est l'être. Ce roi du ciel que vous regardez comme notre Dieu ne serait qu'un tel être, qu'un être particulier, qu'un être fini. Notre

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