3 devant vous. Vous pourrez vous-même, par l'information que vous ferez, savoir de lui les choses dont nous l'accusons. Les Juifs ajoutèrent que tout cela était véritable. Le gouverneur ayant fait signe à Paul de parler, il répondit de la sorte: Sachant qu'il y a plusieurs années vous êtes juge de cette nation, je parlerai sans crainte pour défense: car ma 4 il tiendra ne qu'à vous de savoir qu'il n'y a pas plus de douze jours que je suis venu à Jérusalem pour adorer. Or, ils ne m'ont point trouvé disputant dans le temple avec qui que ce soit, ni amassant le peuple, soit dans les synagogues, soit dans la ville; et ils peuvent vous prouver les choses dont m'accusent aujourd'hui. Cependant, je vous avoue une chose, c'est que, selon cette secte qu'ils traitent d'hérésie, ne ils je ejus ad te venire: a quo poteris ipse judicans, de omnibus istis nos accusamus eum. cognoscere, de quibus 9. Adjecerunt autem et Judæi, dicentes hæc ita se habere. 10. Respondit autem Paulus (annuente sibi præside dicere): Ex multis annis te esse judicem genti huic sci ens, bono animo pro me satisfaciam. 11. Potes enim cognoscere quia non plus sunt mihi dies quam duodecim, ex quo ascendi adorare in Jerusalem; 12. Et neque in templo invenerunt me cum aliquo disputantem, aut concursum facien tem turbæ, neque in synagogis, 13. Neque in civitate; neque probare possunt tibi de quibus nunc me accu sant. 14. Confiteor au tem hoc tibi, quod secundum sectam quam dicunt hæresim, sic deservio Patri et' Deo 3 Vous pouvez savoir de lui, c'est-à-dire de Paul ou de Lysias; la phrase est ambiguë, cependant il paraît plus raisonnable de l'entendre de Lysias. Félix même paraît l'avoir entendue ainsi, puisqu'il termine la séance par ce mot: Je vous entendrai quand le tribun Lysias sera arrivé. 4 Juge, c'est-à-dire ici gouverneur. Les Juifs étaient assez dans l'usage de donner le nom de juge au magistrat qui avait la souveraine administration des affaires; ce qui pouvait leur être venu de leurs premiers juges, dont le gouvernement avait précédé celui des rois. On sait que par l'autorité ces juges étaient au moins des dictateurs. S. Paul dit qu'il plaidera sa cause avec plus de confiance, parce qu'il sait que Félix est juge de la nation depuis plusieurs années. On ne voit pas la conséquence de l'un à l'autre, et on la voit d'autant moins que l'administration de Félix n'avait été qu'une suite d'injustices, de meurtres et de rapines. Cependant, quoique nous ne le voyions pas, il faut bien, puisque S. Paul le dit, que ce fût pour lui un motif raisonnable de confiance; sans cela ce n'eût été qu'un compliment, et assurément S. Paul n'était pas un complimenteur. 5 Les noms de secte et d'hérésie n'avaient pas toujours chez les Juifs le mauvais sens que nous leur donnons ; cependant ils l'avaient quelquefois, surtout celui d'hérésie, comme on le voit par la manière dont S. Paul le relève. quæ in Lege et Prophetis scripta sunt, 15. Spem habens in Deum, quam et hi ipsi exspec meo, credens omnibus sers mon Père et mon Dieu, croyant tout ce qui est écrit dans la Loi et dans les Prophètes, espérant de Dieu, comme ils l'entendent eux-mêmes, la résurrection future des bons et des méchants. C'est dans cette vue' que je m'étudie à avoir toujours une conscience irréprochable devant Dieu et devant les hommes. Or, après tant, resurrectionem futuram justorum et iniquorum. 16. In hoc et ipse studeo sine offendiculo conscientiam habere ad Deum et ad homincs semper. 17, Post annos autem ones, et vota. 18. In quibus invenerunt me purificatum in templo non cum turba, neque cum tumultu. 19. Quidam autem ex Asia Judæi, quos oportebat apud te præsto esse, et accusare si quid haberent adversum me; plusieurs années, je suis venu pour faire plures, eleemosynas des aumônes à ma nation, avec des offranfacturus in gentem meam veni, et oblati- des et des vœux. C'est à quoi j'étais occupé lorsqu'ils me trouvèrent purifié dans le temple, sans attroupement et sans bruit. « Au reste, ceux qui m'y trouvèrent » ce sont quelques Juifs de l'Asie, lesquels devaient paraître devant vous, et se porter pour accusateurs, s'ils avaient quelque chose à dire contre moi; ou que ceux qui sont ici déclarent, pendant que je suis devant le conseil, s'ils ont trouvé quelque crime en moi, si ce n'est d'avoir dit tout haut cette seule parole, étant au milieu d'eux C'est pour la résurrection des que vous me faites aujourd'hui mon procès. 20. Aut hi ipsi dicant si quid invenerunt in me iniquitatis, cum stem in concilio, 21. Nisi de una hac solummodo voce, qua clamavi inter eos stans: Quoniam de resurrec tione mortuorum ego judicor hodie a vobis. morts 4 Dans la vue de la résurrection. Aidons-nous de ce motif, puisqu'un si grand Apôtre ne croyait pas qu'il fût indigne de sa vertu de s'en aider pour préserver sa conscience de toutes souillures. 2 S. Paul se prévaut habilement de l'absence de ces Juifs d'Asie, c'est-à-dire d'Éphèse. C'étaient en effet les premiers ou plutôt les seuls témoins qui devaien être entendus, parce qu'ils étaient les premiers qui l'avaient reconnu dans le temple, qui avaient mis la main sur lui, et qui, par leurs cris, avaient ameuté le peuple. Cependant ceux-ci firent prudemment de ne pas se présenter. Qui sait si Félix n'aurait pas ordonné une information juridique, dont le résultat étant qu'eux seuls avaient été les auteurs du désordre, toute la peine en serait re tombée sur eux? Un mauvais juge est toujours redoutable aux méchants lorsqu'il n'a pas d'intérêt à être injuste. 22. Distulit autem illos Felix certissime Après ce défi, il fallait prouver ou se taire. Il paraît que, >> la preuve leur manquant, ils furent réduits au silence. » Sur quoi Félix, qui était très-bien instruit de ce qui regardait ce genre de vie, les remit à une autre fois. Je vous entendrai, dit-il, quand le tribun Lysias sera arrivé. sciens de via hac, dicens: Cum tribunus Lysias descenderit, aŭdiam vos. Il avait reconnu l'innocence de l'accusé; mais ne voulant 23. Jussitque centu >> pas mécontenter tout à fait ses accusateurs, il prit un milieu » entre la justice et l'injustice. Au lieu de renvoyer Paul ab» sous, comme il y était obligé,» il ordonna à un centurion de le garder; « mais >> en même temps il lui recommanda qu'on eût pour lui des ménagements, et qu'on n'empêchât aucun des siens de lui rendre ses services. 2 Quelques jours après, Félix étant de retour avec Drusille sa femme, qui était juive, manda Paul, et l'entendit parler de la foi en Jésus-Christ. Mais comme Paul parlait de la justice", de la chasteté et du rioni custodire eum, et habere requiem, nec quemquam de su is prohibere ministrare ei. tem dies veniens Felix cum Drusilla uxore sua, quæ erat Judæa, vocavit Paulum, et 24. Post aliquot au audivit ab eo fidem quæ est in Christum Jesum. 25. Disputante autem illo de justitia 1 Ce genre de vie, c'est-à-dire le christianisme. Félix savait au moins que ceux qui le professaient menaient une vie irréprochable. * Drusille était née juive de religion, mais de race iduméenne, puisqu'elle était de la famille des Hérode. Elle eut pour père le premier Agrippa, duquel il est parlé sous le nom d'Hérode au chapitre XII, celui qui fit décoller S. Jacques et emprisonner S. Pierre. Drusille avait épousé en premières noces Azisus, roi d'Émèse. Félix, épris de sa beauté, la fit solliciter de quitter son mari pour se donner à lui. Ele y consentit, et, laissant le roi son époux, elle devint l'adultère d'un affranchi. Azisus s'était fait Juif pour l'épouser; avec Félix païen, elle fut païenne. Ce fut par curiosité qu'elle désira d'entendre S. Paul, aussi n'en profita-t-elle pas. Suétone a dit de Félix qu'il avait été le mari de trois reines on ignore quelles étaient les deux autres. Drusille périt d'une é ruption du mont Vésuve, avec un fils nommé Agrippa qu'elle avait eu de Félix. Cette éruption était la même qui fit périr Pline le naturaliste, et ensevelit la ville d'Herculanum. 3 On reconnaît ici la magnanimité de S. Paul. Sa vie était au pouvoir de Félix, cependant il ose traiter en sa présence les deux points les plus capables de révolter cette âme perverse et ce cœur corrompu, la chasteté et la justice. Il aurait fait peu d'impression, s'il s'en était tenu là. La plus belle mo opportuno accersam rans, quod pecunia ei daretur a Paulo; propter quod et frequenter accersens eum, loque jugement à venir, Félix épouvanté lui dit: Pour le présent, retirez-vous; je vous appellerai quand il sera temps. Il espérait aussi Paul lui donnerait de l'argent; que te: 26. Simul et spe; c'est pourquoi il le faisait venir souvent, et s'entretenait avec lui. Or, au bout de deux ans, Félix eut pour successeur Portius Festus, et, voulant faire plaisir aux batur cum eo. 27. Biennio autem expleto, accepit successorem Felix Portium Festum. Juifs, il laissa Paul en prison 1. Volens autem gratiam præstare Judæis Felix,reliquit Paulum vinctum. - S. Paul accusé devant Festus. Il répond et appelle à César.— Agrippa et Bérénice désirent de l'entendre. Cap. 25, 1. Festus ergo cum venisset in Festus étant donc arrivé dans la pro provinciam, post tri- vince, il alla trois jours après de Césarée 2 rale n'est qu'une inutile spéculation, si l'on n'y joint la peinture d'un jugement inévitable, où la vertu sera couronnée et le vice puni. Félix trembla; c'était pour lui le commencement de la grâce sa frayeur lui fit imposer silence à S. Paul; c'en fut la fin. 1 Si S. Paul lui avait donné de l'argent, il l'aurait remis en liberté ; et parce qu'il voulait plaire aux Juifs, il le laissa dans les fers. Il fut injuste et il n'y gagna rien, ni du côté de l'argent, puisque S. Paul ne lui en donna pas; ni du côté des Juifs, qui envoyèrent des députés à Rome pour l'accuser au nom de la nation. Il aurait succombé sans le crédit de son frère Pallas: ces deux hommes étaient deux esclaves, Arcadiens d'origine. Pallas ayant été affranchi par l'empereur Claude, devint, par l'ascendant qu'il eut sur l'esprit de son maître, l'homme le plus accrédité de l'Empire. Il ne tarda pas à élever son frère Félix, dont il avait procuré l'affranchissement. Lorsqu'ils eurent fait fortune, ils ne manquèrent pas, selon la coutume, de se dire issus des anciens rois d'Arcadie. Le peuple s'en moqua; mais le sénat eut la bassesse de reconnaître, par un acte authentique, cette ridicule prétention. 2 Césarée était la résidence des gouverneurs, et par cette raison la capitale de la Judée considérée comme province romaine. à Jérusalem. Alors les princes des prêtres duum ascendit Jeroso Adieruntque lymam a Cæsarea. 2. eum principes sacerdotum, et primi Judæorum, adversus Paulum, et rogabant eum, 3. Postulantes gratiam adversus eum ut ju beret perduci eum in Jerusalem, insidias tendentes ut interfi Festus autem respondit, servari Paulum in cerent eum in via. 4. Cæsarea se autem maturius profecturum. 5. Qui ergo in vobis (ait) potentes sunt, descendentes si mul, si quod est in viro crimen, accusent eum. 6. Demoratus autem inter eos dies non amplius quam octo aut decem, descendit Cæsaream, et altera die sedit pro tribunali, et jussit Paulum adduci. 7. Qui cum perductus esset, circumsteterunt eum qui ab Jerosolyma descenderant Ju dæi, multas et graves causas objicientes, quas non poterant tionem reddente probare. 8. Paulo ra : Quoniam neque in legem Judæorum, neque in templum, neque in Cæsarem quidquam peccavi. 9. Festus autem volens gratiam præstare Judæis, xit. Vix Jerosolymam respondens Paulo, di 1 Non-seulement il le dit; mais il le prouva, S. Luc ne fait qu'indiquer ici les points qu'il traita; mais il les étendit et les traita avec tant de force, que Festus, convaincu de son innocence, était disposé à le renvoyer absous, si les Juifs, qu'il ne voulait pas désobliger, ne s'y fussent opposés. C'est S. Paul qui le dit au chap. xxvIII, † 13. 2 Puisqu'il se défendit sur ce point, il avait donc été accusé aussi sur ce point. On sait quels étaient les sentiments et la conduite des Juifs à l'égard de la puissance romaine; on sait par les écrits de S. Paul quelle était sa soumission à toutes les puissances. Cependant ce sont ces mêmes Juifs qui osent accuser S. Paul de révolte contre César. La passion n'a pas de pudeur. |